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05.08.2021
#INVESTISSEMENTS

Obligations hybrides : l’essentiel des hybrides Corporates en 7 questions

Dans les secteurs nécessitant de lourdes dépenses d'investissement (Capex), comme les services aux collectivités ou les télécommunications, les hybrides Corporates servent à financer des investissements à long terme, sans pour autant trop alourdir la dette de l'émetteur.

Thierry Trigo

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Aujourd'hui, les hybrides sont également utilisés à des fins de refinancement par des émetteurs qui souhaitent stabiliser leur profil financier et éviter une dégradation de leur notation, dans le cadre par exemple d'une éventuelle fusion ou acquisition. C’est un message positif envoyé aux agences de notation. 


1. Que sont les hybrides corporate ?
 

Il s’agit d’un titre de créance subordonné émis par une entreprise non-financière, qu’on nomme   « Corporate ».  Tous les émetteurs d’hybrides sont notés Investment Grade (IG) au moment de l'émission. Ces titres sont appelées « hybrides » car ils combinent les caractéristiques des obligations (paiement d'un coupon annuel) et des actions (pas de date d'échéance ou une échéance très longue ; l'émetteur peut décider de ne pas payer le coupon, comme c'est le cas pour les dividendes).

 

Les agences de notation considèrent les hybrides Corporates comme moitié dette / moitié capital, appliquant le concept d’« Equity content », qui tend à améliorer les ratios de crédit de l'émetteur.

2. Bien que les hybrides soient « perpétuelles » - ou à très longue échéance, le capital investi peut-il être récupéré sans vendre l'obligation ?  
 

  • Oui, car il y a une première date de call, qui tombe entre 5 et 12 ans après la date d'émission. Si l'émetteur exerce le call, l'investisseur sera intégralement remboursé au prix de 100 %. Il existe une convention de marché selon laquelle les hybrides Corporates sont normalement remboursées à leur première date de call. Il n'y a eu que très peu de cas où les émetteurs n'ont pas exercé le call, survenant en période de forte récession, et/ou lorsque les émetteurs en question ont vu leur notation abaissée en catégorie High Yield (HY).
  • Les émetteurs hybrides gèrent également activement leur dette et peuvent proposer aux porteurs d’une hybride un prix de remboursement, et cela avant la première date de call, dans le but de se refinancer à moindre coût dans le marché. Dans ce cas, le prix proposé aux porteurs de l’hybride offrira une prime par rapport à la dernière cotation du titre. Les investisseurs peuvent décider d'accepter ou non l'offre, mais après cette opération, l'hybride sera souvent moins liquide. 

3. Quels sont les avantages pour l'investisseur ?  
 

  • Un moyen d'investir dans un émetteur solide : les hybrides Corporates sont émises par des sociétés notées IG, ce qui signifie des sociétés au profil financier solide et stable, reflété dans leur notation de crédit (capacité à générer des flux de trésorerie opérationnels récurrents).
  • Un moyen d'obtenir une rémunération plus élevée : les hybrides offrent un rendement attractif par rapport aux obligations seniors. Le supplément de rendement entre une obligation senior et l’hybride d’un même émetteur, avec une première date de call identique à l'échéance de l'obligation senior, dépend des conditions de marché mais peut varier de +100bps à +300bps. Ce spread de crédit existe car les hybrides sont des instruments subordonnés et, par nature, comportent plusieurs risques.
  • Un risque relativement faible, à condition de bénéficier d'une sélection stricte. Les risques d'extension et de report de coupon sont très rares pour les émetteurs fortement positionnés en IG. En outre, selon la méthodologie de Standard and Poors (S & P), les hybrides perdent leur « Equity content » après la première date de remboursement, tant que l'émetteur reste noté IG, ce qui incite à un remboursement à la première date de call. L’émetteur doit également faire attention à sa réputation de marché.
  • En cas de non-paiement d’un coupon, celui-ci devra néanmoins avoir lieu dès que l'émetteur sera en mesure de payer un coupon, et sur une base cumulée. Donc, un coupon non payé n’est pas systématiquement perdu.
  • Une opportunité d'investir dans des hybrides « vertes », car la plupart des nouvelles émissions hybrides ont désormais un format « Green Bonds ».

4. Quelles sont les caractéristiques du marché d’hybrides Corporates ?
 

  • Après une forte croissance depuis 2013, les hybrides Corporates sont désormais un marché mature. En 2021, la valeur totale du marché d’hybrides a atteint 190 Md €, contre 20 Md € en 2013. Sa base d'investisseurs est solide.
  • Le nombre d'émetteurs et d'hybrides a connu une croissance rapide, englobant désormais un grand nombre de secteurs. Toutefois, les principaux secteurs sont les services aux collectivités et les télécommunications, car les Capex dans ces activités restent substantiels.
  • Le marché est principalement en euros. Les autres devises utilisées sont l'USD, le GBP et marginalement le CHF, par ordre de volumes décroissant.
  • Il s'agit d'un marché assez liquide : les émissions ont souvent une taille « benchmark » (soit 500 millions € ou plus) et les prix sont cotés dans une fourchette de cours acheteur/vendeur assez serrée.
  • L'intensité primaire (nouvelles émissions d’hybrides) peut être irrégulière et dépend du contexte de marché.
  • Enfin, la plupart des nouvelles émissions hybrides ont désormais un format « Green Bond ».

5. Quels sont les risques associés à la détention d'hybrides Corporates ?

  • Risque de crédit : c'est un facteur majeur. Bien que ce risque soit assez faible pour les émetteurs bénéficiant d'une notation Investment Grade élevée (A/A-/BBB+), il est plus fort pour les émetteurs BBB- en période de crise.
  • Risque de taux d’intérêt : le prix des titres hybrides ayant une première date de call assez lointaine est plus sensible aux fluctuations des taux d'intérêt.
  • Risque de subordination : les hybrides sont des titres de créance subordonnés. Cela signifie que leur notation est, en moyenne, inférieure de 2-3 crans à la dette senior d'un même émetteur (les hybrides sont souvent notées HY). En cas de défaillance de l'émetteur, le taux de recouvrement pour les détenteurs de titres hybrides est généralement assez faible, les détenteurs de dette senior ayant la priorité (premier rang, après le paiement des salaires, des impôts et de toute dette garantie). Toutefois, les défauts d’émetteurs bénéficiant d'une notation Investment Grade sont extrêmement rares.  
  • Risque d'extension : un émetteur peut décider de ne pas rappeler l'hybride à sa première date de call. Ce risque est structurellement faible, mais lorsqu'il se produit, ou si ce scénario est anticipé par le marché, le prix de l'hybride peut baisser d'environ 10 %. Cet événement peut survenir lorsque la notation de l'émetteur est dégradée en HY, reflétant une détérioration de son profil de crédit depuis l'émission. Toutefois, depuis 2013, les cas ont été rares.
  • Coupon inférieur lors du re-calcul du coupon : si l'hybride n'est pas rappelée à sa première date de call, le coupon fixe est systématiquement recalculé et devient un coupon offrant un taux variable et basé sur des taux du marché monétaire ou sur les taux Swap long-terme. Lorsqu'il est réinitialisé, il peut être beaucoup plus faible que le coupon fixe initial et déclencher des ventes sur le marché par les investisseurs. 
  • Report du paiement du coupon : un émetteur peut décider de ne pas payer un ou plusieurs coupons de son ou ses hybrides. Ce risque est très faible (plus faible que le risque d'extension) pendant les périodes de croissance économique, mais ce scénario peut survenir si l'émetteur rencontre de graves difficultés de liquidité. Ce scénario ne se matérialise que lorsque la rémunération des actionnaires est suspendue. Un tel événement nuit gravement à la réputation de l'émetteur, réduisant ainsi sa capacité à emprunter sur le marché obligataire à l'avenir. 
  • Risque de remboursement anticipé : là encore, c'est à la discrétion de l'émetteur. Certaines clauses spécifiques du prospectus d'émission peuvent prévoir le déclenchement d'un rappel anticipé au prix de 101 %, en cas de changements de méthodologie des agences de rating/fiscaux/comptables. Par conséquent, elle aura un impact sur les hybrides qui se négocient à un prix de marché élevé. Mais il n'y a pas de changement de méthodologie (des agences de notation) tant que l'émetteur remplace une hybride rappelée à la première date de call par une nouvelle hybride.
  • Risque de volatilité : les hybrides Corporates sont positivement corrélées aux marchés actions. Durant les périodes d'aversion au risque, le cours des actions baisse et le spread de crédit sur les hybrides s'élargit, entraînant une baisse du prix de ces dernières.

 

6. A quel moment un investissement en hybrides peut-il devenir compliqué ? Un exemple de situation.
   

Un émetteur opportuniste sur le marché des hybrides (noté BBB- avec perspective négative) est confronté à une forte dégradation de son profil de crédit. Sa notation a été dégradée par S&P en catégorie HY. Par conséquent, la probabilité de non-call à la première date de call augmente. L'émetteur décide finalement de ne pas exercer le call. L'émetteur étant noté HY, S&P étend l’ «Equity content» pour les cinq années suivantes. Par conséquent, malgré une autre date de call dans 6 mois, l'hybride peut ne pas être rappelée pendant cinq ans. Le coupon fixe, recalculé comme un coupon flottant, est indexé au taux 3 mois euro majoré d'une faible marge (+130 bp, par exemple). Par conséquent, le coupon passe d'environ 2 % à 0,70 %, ce qui contribue à l'accélération de la baisse du prix de l’hybride. Enfin, l'émetteur rencontre des difficultés d'exploitation plus graves et décide de ne pas payer le coupon de l’hybride afin de préserver sa situation de liquidité. Le prix de son hybride perd alors à nouveau de la valeur sur le marché et elle devient totalement illiquide. Et cette situation peut persister sans recours possibles car ces événements ne sont pas considérés comme un défaut effectif de l'émetteur.

7. Pourquoi est-il important de bénéficier des connaissances d'un expert pour une sélection d'hybrides ?

  • Les experts obligataires de BNP Paribas Wealth Management suivent le profil financier des émetteurs et évaluent leur capacité à résister à une crise économique ou à un choc de marché (par exemple, ont-ils la capacité de préserver leur situation de liquidité ?) et éviter de subir une dégradation brutale de leur rating par les agences de notation.

 

  • Nous préférons sélectionner des émetteurs hybrides qui vont rester notés IG quel que soit le contexte macroéconomique et qui bénéficient d'une situation de liquidité saine. Il existe, au final, très peu de risques pour un investisseur en hybrides, tant que l’émetteur est et reste noté IG par S&P.

 

  • De plus, pour cette catégorie d'émetteurs, il est possible de sélectionner des hybrides bénéficiant elles-mêmes d'une notation IG, bien que la notation d’une hybride soit toujours inférieure de deux à trois crans à la notation de son émetteur.

 

  • Si l'hybride n'est pas rappelée à la première date de call, le coupon est recalculé et devient un coupon flottant. Ce nouveau coupon peut être lié aux taux du marché monétaire ou aux rendements à long terme des swaps en euros auxquels une marge est ajoutée. Il appartient donc aux experts de calculer si cette marge rémunère suffisamment les risques associés à chaque hybride, réduisant ainsi la probabilité d'un « non-call » à la première date de call.

 

  • L'expertise est également essentielle pour les hybrides notées uniquement par Moody's ou Fitch, et pour celles qui ne sont pas notées (NR).

 

  • Dans le contexte macroéconomique actuel (nous sommes en phase de reprise), nous avons un nombre assez important d'hybrides Corporates sur notre liste Buy. Par ailleurs, nous recommandons également une sélection de fonds investis en partie en hybrides.

 

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